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LES EXPOSITIONS CANINES POUR LES NUL(LE)S

Actualité publiée le 17/09/2014

du Hogan des Vents - LES EXPOSITIONS CANINES POUR LES NUL(LE)S

LES EXPOSITIONS CANINES POUR LES NUL(LE)S



Mathieu Mauriès



 



Imaginez que vous rentrez dans un supermarché. Vous vous dirigez vers le rayon des conserves. Qu’allons-nous observer ? Des légumes en conserves : petits pois, haricots, flageolets, carottes, cœurs de palmiers … des poissons en conserves : thon, maquereau, sardines, anchois … des fruits en conserves : pêches, abricots, poires, cerises … Bref une très grande diversité d’aliments salés ou sucrés. Posons que chaque boite de conserve est un « individu chien » inscrit dans un livre d’origine comme le LOF pour les chiens nés en France. OK ? Et là commence la démonstration.



 



Le but du jeu est de faire classer par un dégustateur, par ordre de mérite, dans chaque catégorie (par exemple le thon dans ses différentes origines et préparations) les boites dont les contenus ont les meilleures qualités organoleptiques, ou en plus clair les boites les plus délicieuses à déguster … Jusque là vous croyez que tout va bien et qu’il suffit d’avoir un bon palais pour estimer la qualité des dits produits SAUF QUE le dégustateur ne peut pas ouvrir les boites car c’est strictement interdit par le règlement européen BIPBIP007 ! Ben oui il va falloir qu’il use de son prestigieux talent (il aura suivi pour cela des cours de télépathie culinaire dispensés par des vétérinaires sanitaires) pour distinguer sans jamais les avoir goûté les meilleures boites de conserves du rayon.



 



Nous nous retrouvons donc dans une première étape avec 25 boites de thon à l’huile provenant de 5 pays et arrangées avec différentes huiles aromatisées ou pas. Chaque boite en compétition est présentée par une hôtesse déléguée par la marque d’origine.



 



Pas facile de dire quelle est la meilleure boite sans goûter quoi que ce soit … Alors que fait notre dégustateur ? Et bien il reluque savamment l’extérieur de nos boites de thon agrémenté de fioritures diverses et variées comme de jolies couleurs, un beau dessin, des photos choc ou un papier brillant sans oublier les hôtesses qui usent outrageusement de leurs charmes pour séduire le dit juge et remporter le pompon !



 



Le dégustateur va classer les boites de thon par ordre de qualité dans le rayon des poissons en conserves. Il va donc sortir une boite gagnante dans cette catégorie.



 



Il va procéder de la même façon avec les autres boites de conserve de poissons et pour chaque catégorie il désignera à la suite du meilleur thon [1] le meilleur maquereau [2] la meilleure sardine et ainsi de suite.



 



A la fin de cette évaluation il désignera la meilleure boite du rayon conserves de poisson.



Après les poissons, notre dégustateur se verra confier la même mission concernant les légumes et les fruits au sirop. Dans chaque catégorie d’aliment il désignera également la meilleure boite.



Au final notre dégustateur devra départager les 3 meilleures boites de conserve du Supermarché (tous les 4 ans la compétition a lieu dans un hypermarché d’un pays européen). Il se trouvera ainsi face à une boite de thon à l’huile, une boite de cœurs de palmiers et une boite d’abricots au sirop. Deux relèvent des aliments salés et l’autre des aliments sucrés n’est-il pas ? Alors comment les mettre en compétition, c’est difficile me direz-vous mais voilà que l’hôtesse tenant en main la boite de thon avec sa jupe ultra courte et ses 10 ans de moins va mettre au tapis son aînée tenant la boite d’abricots au sirop et son look un peu ringard, ainsi que l’hôtesse cœurs de palmiers un peu trop discrète.



Et voilà notre dégustateur qui n’aura de fait jamais rien dégusté proclamant grand vainqueur du supermarché rayon « conserves » notre fameuse boite de thon à l’huile. Faut quand même le faire, dire que c’est très bon sans jamais l’avoir goûté, vous ne trouvez pas ça bizarre vous ?



 



Vouloir comparer des abricots, des cœurs de palmiers et du thon, cela ne vous semble-t-il pas étrange ? Et pourtant c’est exactement ce qui se passe dans les expositions canines lors de la désignation du meilleur de chaque groupe et du grand gagnant de l’exposition, le fameux BIS (Best In Show). Les juges comparent sans aucun complexe un chihuahua et un dogue allemand qui n’ont franchement rien à voir l’un avec l’autre et ils arrivent à savoir lequel des deux est le plus beau. Ils sont vraiment trop forts, j’en reste sur le cul !



Pour en rajouter une couche imaginez aussi que notre dégustateur de supermarché se retrouve dans un rayon dont les luminaires sont à moitié éteints et gênent donc la vision ou bien dans un rayon très bien éclairé où il aura une meilleure vue sur les boites à évaluer. C’est la même chose lorsqu’une race de grands chiens est jugée dans un ring trop petit ou un ring suffisamment grand pour que les chiens puissent se déplacer normalement.



 



Et maintenant pour y voir plus clair remplacez le terme « dégustateur » par JUGE, le terme «  jeu » par EXPOSITION et le « rayon des poissons en conserves » par GROUPE 2 pour finir par proclamer notre boite de thon à l’huile BEST IN SHOW du supermarché.



 



« La critique est aisée mais l’Art est difficile » [3] … Alors les expositions canines ont-elles encore un intérêt ?… en dehors du fait de satisfaire l’ego surdimensionné de certains éleveurs prêts à tout pour gagner, les enjeux financiers n’étant pas si anodins pour qui possède un étalon titré par exemple ...



 



Certainement si elles sont utiles à la conservation des races canines comme cela était leur raison d’être initiale.



Pour estimer la qualité d’un aliment il faut bien évidemment le goûter. Pour estimer la qualité d’un chien il faut bien évidemment aller au-delà des simples apparences, surtout dans un but d’élevage et de sélection.



 



L’estimation des chiens doit se faire sur une réalité biologique. De nos jours les jugements d’exposition ne concernent plus que l’aspect extérieur du chien, la qualité du toilettage et de la présentation voire le « Look » du Handler au point de se demander qu’est-ce qui est en définitive jugé ?



Les expositions de conformité au standard sont malheureusement devenues des expositions de beauté point à la ligne. De véritables spectacles basés sur tous les excès au détriment de la santé et du bien être des chiens. Des chiens totalement handicapés, physiquement et mentalement, se retrouvent ainsi propulsés sur les plus hautes marches des podiums. Ceux-là mêmes qui engendreront, si tôt leurs titres de champions homologués, les générations futures toujours plus tarées … à l’image par exemple de ces pauvres bergers allemands qui ne tiennent même plus sur leurs pattes arrière ou ces Lhassa Apso au poil si long qu’ils ne peuvent plus ni voir ni marcher de façon naturelle, et encore faudrait-il qu’ils soient autorisés à se promener dans les herbes folles [4] ... La maltraitance a de multiples visages. Elle est omniprésente dans les expositions canines où de pauvres chiens contraints à une immobilité forcée sous la menace de leur Handler sont bombardés de produits chimiques et de coups de brosses rageurs [5]. C’est juste aussi honteux que la corrida mais bien plus pervers et insidieux. Ah on les aime les vainqueurs, on les couvre de baisers devant un public admiratif … mais les perdants on en fait quoi ? Vaut mieux ne pas savoir n’est-ce pas ?



 



La sélection sur la posture, née de ce système d’exposition, conduit à faire émerger et concentrer les problèmes génétiques alors que la sélection sur la fonctionnalité les écarte.



 



Dans la réalité les titres CAC, CACIB ou Champion n’ont aucune pertinence sur le plan biologique concernant le maintien et l’amélioration des races canines car ils sont seulement basés sur une apparence – souvent artificielle – à un moment donné … Une chienne avec des mamelles ??? Mon dieu mais comment osez-vous me présenter une telle abomination ? Tout le monde sait bien que les chiennes d’expo n’ont pas de mamelles !!! [6]



Toutes les fonctions biologiques nécessaires à la survie de l’espèce, comme la capacité à se reproduire ou la faculté pour les mères d’allaiter correctement leurs petits, sont totalement ignorées. C’est ainsi que certaines races canines sont devenues totalement incapables de se reproduire ou d’élever leurs jeunes sans assistance humaine. Dans les pires situations c’est jusqu’au système digestif qui est modifié (cas du bouledogue français par exemple) conséquence directe de cette seule sélection sur l’apparence, totalement désastreuse sur le plan biologique.



 



Le système actuel d’évaluation des races canines conduit donc à une artificialisation totale qui est tout sauf une approche naturelle, durable et respectueuse des animaux. Sans compter la promotion à tout va de la consanguinité. Chaque nouvelle génération est mise au monde par un nombre excessivement restreint d’étalons, les voire LE champion(s) à la mode. Cette consanguinité rampante participe largement au désastre actuel du chien de race.



 



Fertilité, prolificité, qualités maternelles, croissance des chiots, mortalité chez le chiot, mortalité chez l’adulte, longévité, rusticité sont autant de critères zootechniques indispensables à l’élaboration d’un programme d’élevage. Sans eux il est totalement illusoire de parler de sélection génétique. Ces critères sont également nécessaires pour suivre l’évolution d’une population animale et éviter des dérives nuisibles à son maintien, une relative homogénéité, et sa diversité génétique. Une standardisation excessive, produisant à terme des clones, est totalement à l’opposé de la biodiversité qui reste un gage d’adaptation à l’évolution du milieu. Et l’évolution du milieu genre le réchauffement climatique on va se le prendre en pleine gueule.



 



Les programmes de sélection pour les chiens doivent être basés sur des données mesurables tant sur le plan de la morphologie, que sur des critères liés à la reproduction et au comportement. Et c’est l’ensemble de ces données qui doit être pris en compte pour réaliser une sélection pertinente et maintenir une population naturellement viable et en bonne santé.



 



Il s’agit aussi de mieux former les éleveurs qui ont tendance à diaboliser toute approche technique sous prétexte que le chien est un animal de compagnie et non un animal de rente. Il faut sur ce plan-là bien distinguer « l’outil technique » qui est neutre et « l’utilisation » qui en est faite avec des résultats qui peuvent être aussi exceptionnels que catastrophiques. L’élevage des animaux de rente (ovins, caprins, bovins, volailles …) en est une illustration parfaitement désastreuse concernant l’élevage industriel où le rendement est l’unique priorité avec des animaux qui souffrent du jour de leur naissance au jour de leur mort.



 



C’est là qu’une nécessaire éthique de l’élevage doit s’imposer au niveau des éleveurs mais aussi de toutes les parties prenantes de la filière canine.



 



Malheureusement la formation continue des éleveurs canins reste aux mains de la profession vétérinaire aussi nulle en génétique qu’elle l’est en alimentation. Les vétérinaires sont des médecins des animaux ni plus ni moins. Leur titre ne leur confère pas un savoir universel comme ils voudraient bien le faire croire. Ils ont monopolisé le monde canin à des fins éminemment financières. L’éthique qui règne dans cette profession est fortement discutable [7].



 



Pour preuve je citerai le Dr Patricia Jordan, vétérinaire aux USA, qui a osé briser la loi du silence :



 



« En pratique vétérinaire conventionnelle, 15 % du revenu provient de l’administration des vaccins mais 60 % résulte du traitement de toutes les maladies induites par l’injection de ces vaccins … On peut dire que la majorité du revenu des vétérinaires conventionnels est liée au fait de pousser les chiens dans un cycle infernal de maladies chroniques. … De 2006 à 2008 j’ai travaillé dans un cabinet vétérinaire conventionnel. J’ai été horrifiée parce que j’ai vu. Dans les 3 premiers mois de mon activité dans ce cabinet j’ai vu plus de 700 chiens malades des effets secondaires générés par les vaccins. Chaque semaine c’est environ 21 chiens qui étaient euthanasiés des suites d’une maladie provoquée par la sur vaccination. Les chiens développaient en moyenne 2 maladies auto-immunes et ils étaient euthanasiés à l’âge de 5-6 ans. »



 



Source : Dogs Naturally, Vol 5, Numéro 4, Juillet-août 2014, pages 10-11 [8]



 



La situation est encore plus dramatique car c’est la SCC toute entière qui est aux mains de cette profession qui fonctionne comme une véritable mafia partenaire des laboratoires pharmaceutiques et des laboratoires d’analyses dans un business qui leur est mutuellement profitable. Ce sont les éleveurs qui devraient diriger la SCC et pas des vétérinaires qui en ont fait une rente.



 



Pourquoi ne pas déjà commencer par poser des conditions pertinentes à la confirmation des chiens en fonction de leur origine ?



Prenons l’exemple du Border Collie qui est en France la seule race canine dont l’examen de confirmation comprend un Test d’Aptitudes Naturelles au travail (TAN). Ce test, très simple, n’a rien d’une épreuve de travail puisqu’on n’y juge pas la réalisation d’un exercice mais plutôt la réaction du chien.



 



Il se déroule de la manière suivante :



 





  • Examen du standard physique




  • Examen du caractère




  • Début du TAN : 10 brebis sont maintenues dans un parc grillagé et circulaire de 6 mètres de diamètre.




  • Approche du troupeau, chien en laisse, arrêt à 10 m. Intérêt du chien ?




  • Le chien est lâché, maître toujours immobile ; étude de sa réaction ?




  • Le maître fait demi-tour, s’éloigne de 20 m. Si le chien ne bouge pas, il l’appelle. Etude de sa réaction ?




  • Reprise en laisse à 10 m.




  • Le chien est tenu par le confirmateur, le maître va ouvrir le parc, fait sortir les brebis et referme. L’expert lâche le chien. Etude de l’intérêt du chien pour les brebis ?




  • Le maître se déplace, d’abord circulairement autour du troupeau, ensuite en « conduite », cherchant à attirer les animaux à lui. Le tout sur 30 m.




  • Figure libre : le maître montre à l’expert ce que le chien sait faire.



     





Source : www.bordercollie-fr.net



 



Les chiens de troupeau, qu’ils soient de conduite ou de protection, devraient être évalués sur leur comportement spontané vis-à-vis d’un troupeau, à l’égal de ce qui est fait pour le Border Collie.



Pour les brachycéphales (bouledogue français, carlin, bulldog anglais) des tests d’effort devraient être obligatoires à la confirmation. Et les chiots nés au-delà d’une césarienne par chienne devraient être refusés à l’inscription au LOF. Enfin seules les saillies naturelles devraient donner accès à une inscription au LOF de la portée. Quelques exemples qui redonneraient de la crédibilité au monde canin.



 



Il est grand temps de revoir autant les modalités de confirmation que le fonctionnement des expositions afin de préserver l’Avenir de nos compagnons à 4 pattes. Vous feriez une salade de fruits avec du thon à l’huile et des abricots au sirop vous ?



 



Il est aussi grand temps que les professionnels de l’élevage canin reprennent le contrôle de leur filière afin de mettre en place des politiques d’élevage respectueuses de la santé et du bien être de nos chiens dans un véritable esprit de conservation et d’amélioration des races canines. Sans oublier pour autant une nécessaire rentabilité afin que les éleveurs puissent vivre dignement de leur travail.



 



Finalement les expositions ne sont ni plus ni moins qu’un « outil » dans la démarche de sélection dont le but ultime est de repérer les meilleurs parents pour engendrer la génération suivante. A nous de les utiliser pour le pire ou pour LE MEILLEUR.



 



Alea jacta est



Le sort en est jeté



 



[1] Toute ressemblance avec des personnes ou des chiens existant ou ayant existé serait le fruit d’une pure coïncidence



 



[2] Idem que [1]



 



[3] Philippe Destouches



 



[4] Idem que [2]



 



[5] Je suis allergique aux brosses



 



[6] Des cours de physiologie de la reproduction pour les juges afin de leur montrer l’utilité des mamelles, ne serait-ce pas une bonne idée ? Nous parlons bien évidemment ici des mamelles canines.



 



[7] A quand une association pour défendre les éleveurs victimes de la profession vétérinaire ?



 



[8] Une revue absolument fantastique face à la médiocrité crasse des revues concernant le chien en France. Evidemment en langue anglaise …



Site https://www.dogsnaturallymagazine.com/



 


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